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Se fixer ses propres objectifs à l’entraînement

Des objectifs, normalement, on en a tous : compétitions, technique, tactique, et j’en passe. Si vous avez déjà lu l’article qui parlait des différents types d’objectifs, vous savez à quel point c’est passionnant !

Alors oui, vous savez peut-être à quelles compétitions vous allez participer. Votre coach a listé les objectifs pour l’entraînement du jour, et pour le suivant, et encore d’autres. Votre préparateur physique a minutieusement préparé le nombre de répétitions à effectuer, avec un certain repos entre les séries.

Mais pouvez-vous venir à l’entraînement avec vos propres objectifs ? Oui, et c’est ce qu’il faut faire !

Quelques rappels sur le modèle SMARTE dans la fixation d’objectifs

Le modèle SMARTE est un modèle connu permettant de garantir qu’un objectif soit :

  • Simple : pas de phrases incompréhensibles
  • Mesurable : on doit pouvoir l’évaluer
  • Ambitieux : quand c’est trop simple, ça ne motive pas toujours
  • Réaliste : ambitieux, mais pas trop non plus !
  • Temporel : fixé dans le temps
  • Écologique ou Environnemental : vous devez vous sentir soutenu par votre entourage

C’est un bon modèle pour commencer à réfléchir sur les objectifs, même si pour les « petits objectifs », c’est parfois un peu compliqué, nous allons y revenir.

Les objectifs dans Le cas du sportif sans entraîneur

C’est finalement un cas qui arrive régulièrement en préparation mentale : un sportif autonome ou isolé, accompagné partiellement ou pas du tout. Pour ne citer que quelques exemples que j’ai pu rencontrer : handisport, ski freeride, ou escalade.

Le sportif est son propre coach, et le préparateur mental aura un rôle à jouer dans tout ça. Avant de se pencher sur les objectifs de séances, on se projette déjà sur plusieurs mois, voire années, et on fixe les objectifs en fonction.

Chaque séance doit alors servir un objectif plus grand, qui lui-même servira un objectif encore plus lointain et proche de l’échéance. Comment le préparateur mental peut-il aider ? C’est à la fois très simple et très complexe, car il ne peut pas être spécialiste de toutes les disciplines mondiales !

La première chose à faire, c’est de faire lister au sportif tout ce qui lui semble important dans son sport. Pas forcément les points à développer, mais tout. On obtient alors une liste assez longue, qu’on organise en différents points : technique, tactique, physique, communication, alimentation, récupération, mental, comportemental, par exemple ! Il faudra répartir les différents objectifs dans l’année, en fonction des contraintes telles que la progression, les moyens disponibles, les conditions météorologiques saisonnières, les objectifs qui dépendent d’autres objectifs, les personnes qui pourront vous aider, etc.

On liste tout, on organise, et on s’y tient. Parce que sans faire ça, on tourne en rond, et on se réveille un mois avant une compétition importante en se disant « mince, je devrais peut-être faire un peu plus de ce truc-là ». Sauf que « ce truc-là », c’est de la préparation physique, et vous n’êtes pas forcément spécialiste. Alors vous allez faire un cycle qui va faire effet 2 mois après votre compétition !

Fixer des objectifs, ce n’est pas tout faire tout seul, c’est réfléchir en amont pour savoir comment s’organiser, à qui demander des conseils, du matériel, etc. Une fois que vous en êtes à ce stade, vous pouvez fixer vos objectifs de séances.

Le cas du sportif avec entraîneur

C’est bien, comme à chaque fois, vous allez mettre votre vie de sportif entre les mains de votre coach. Celui qu’on vous a donné, ou celui que vous payez. Et comme à chaque fois, vous allez vous investir pleinement.

Oui, mais voilà, votre coach entraîne aussi 15 autres personnes dans l’équipe, et ses objectifs concernent le groupe. En plus, il ne peut pas observer forcément tout le monde. C’est à ce moment précis que vous devez réfléchir à vos propres objectifs de séance. En général, ça ne concerne pas la préparation physique, mais c’est possible sur des thématiques précises : récupération, échauffement, etc.

Même à haut niveau, quand on a 15ans, c’est bien de lister ce qui est important pour sa progression. Avoir ses propres objectifs techniques qu’on peut travailler pendant un entraînement, c’est génial et très formateur. Et j’invite souvent les jeunes à faire part de leurs réflexions, ou de notre travail. Quand vous avez une fille de 14ans qui vient voir son coach en étant force de proposition, c’est gagné. Au pire, l’entraîneur dira « laisse tomber, fais-moi confiance je gère ». Au mieux, et c’est la majorité des cas, il dira « c’est super d’avoir identifié tout ça, je vais en prendre note et te faire quelques feedbacks quand c’est possible ». Évidemment, quand le côté « investissement » joue pour une sélection, ceux qui montrent à quel point ils sont impliqués marquent des points.

Enfin, si certains objectifs paraissent compliqués à coupler avec l’entraînement classique, votre coach saura vous ouvrir des portes pour leur laisser une place, ou inclure une séance spécifique. Celle-ci servira votre projet, donnera des idées à l’entraîneur, le stimulera. Un bon coach a toujours envie de bien faire !

Un objectif de séance en préparation physique

Que vous soyez acteur de votre planification, accompagné, coaché, ou complètement autonome, le cas de la préparation physique est déjà très intéressant. Reprenons le modèle SMARTE. L’idée, ce n’est pas d’avoir 50 objectifs dans une séance, mais peut-être 2 ou 3, voire un peu plus, et de s’y tenir.

S : je fais 5 tractions en supination à 90% de ma force maximale

M : réussite si les 5 tractions ont été effectuées

A : d’habitude, j’en fais plutôt 4.5, mais je vais me donner à fond !

R : pas question d’en faire 10, 5 c’est bien.

T : c’est prévu après mes 45minutes d’échauffement, et avant l’exercice de renforcement des rotateurs externes de l’épaule.

E : ma femme ne m’attend pas à la maison avant 19h, j’ai le temps de faire ma séance sereinement.

Pour la préparation physique, rien de plus simple, le modèle SMARTE correspond parfaitement à ce qui se passe dans la réalité.

Un objectif technique de séance

Vous voulez vous entraîner sur un geste précis de votre discipline ? C’est super de faire des essais, mais allez jusqu’au bout. Si vous avez connaissance des échéances importantes, alors vous saurez que sur telle compétition, vous pourrez vous focaliser sur tel objectif technique par exemple. Plutôt que d’y aller juste en voulant faire « une perf », mettez à profit ces compétitions « d’entraînement ». Si l’Ego n’aime pas faire 5ème sur les France, mais que vous êtes sélectionné de toute façon pour les coupes d’Europe et que c’est votre objectif, alors profitez des France pour inclure un objectif particulier. Un objectif qui se travaille uniquement en compétition. Savoir où on va, comment, pour quoi et pourquoi, c’est une base.

S : A chaque lancer, j’aurai un angle de 45° avec le sol.

M : je dispose d’un coéquipier qui peut faire des photos et filmer. On calera l’appareil sur un trépied, bien positionné à l’horizontale par rapport au sol. Je vais réussir au moins 8 lancers sur 10. Challenge à 10/10.

A : je suis souvent à 35°, je vais réussir à atteindre 45°.

R : j’arrive quelquefois à lancer avec cet angle de 45°, et je fais de super performances à chaque fois !

T : je ferai cet exercice en fin d’échauffement. J’ai vu avec mon coach, je lui ai expliqué mon objectif du jour, et il est d’accord pour que Sylvain utilise son appareil à ce moment-là.

E : comme j’ai prévenu mon entraîneur, il a organisé l’entraînement pour que les autres fassent un autre exercice qui me concerne moins pendant 15 minutes.

C’est un exemple qui montre encore une fois l’importance de la communication et de l’anticipation. Même si c’est possible 1 fois sur 10, parce que l’entraîneur a du mal à vous accorder cette place, c’est mieux que rien ! Enfin, il existe des objectifs techniques très faciles à intégrer, pendant un échauffement par exemple : se focaliser sur un placement de pied, une position de regard, un angle, etc.

Un objectif mental ou comportemental

Certains objectifs ne dépendent que de vous, et il n’est pas toujours simple d’en parler avec son entraîneur. C’est le cas d’une perte de plaisir ou de sensation par exemple. Sans rentrer dans ce cas, ce qui pose souvent problème, c’est le côté « mesurable ». C’est pourtant possible ! Créez une échelle de 0 à 10 par exemple, avec des critères si besoin. C’est subjectif, mais c’est mieux que rien. Marquer : « je veux me faire plaisir à 7/10 minimum » invite déjà à se questionner sur le « comment faire ».

Prenons un exemple sur un cas très classique : « l’agressivité ». J’utilise ce mot, car tout le monde l’utilise, et il n’a pas la même signification pour les uns et les autres ! Votre coach vous dit souvent « tu n’es pas assez agressif ? ». Cela fait des mois que vous entendez ça et vous avez pourtant l’impression de l’être ? Vous avec un feu intérieur, les dents qui se serrent avant chaque frappe, et toujours cette remarque. Problème en vue, n’est-ce pas ? Vous avez 2 options :

  • Demander à échanger avec votre coach sur ce qu’il entend par « agressif ». C’est intéressant, et il vous apportera des éléments de réponses, des comparaisons, etc.
  • Prendre un autre point de vue sur vous-même, vous regarder à la 3ème personne. Qu’est-ce que je dégage comme impression quand on me voit ? Est-ce que les autres perçoivent que je suis une machine de guerre ? La vidéo est un excellent outil pour ça !

Dans les deux cas, vous prendrez rapidement conscience que votre corps n’est pas forcément en accord avec ce que vous ressentez intérieurement. Et dans certains sports, ça peut déjà poser problème, car vous ne semblez pas forcément si confiant aux yeux des autres, si charismatique, si sûr de vous, si déterminé, etc. C’est finalement une question de communication ! De quoi vous fixer quelques objectifs, expérimenter, explorer. Par exemple par :

S : à chaque pénalty, je fixe le gardien en plissant les yeux, je prends une grande inspiration et je gonfle le torse en serrant les poings.

M : je profite de l’exercice hebdomadaire de pénalties pour mettre à profit tout ça. Sur les 15 tirs, je serai un tireur agressif et le gardien me craindra.

A : je ne sais pas trop faire parler mon corps, mais c’est jouable, je l’ai déjà fait dans mon miroir !

R : n’importe quel sportif peut montrer de l’agressivité.

T : j’ai 15 tirs en fin de séance vendredi soir. 15 minutes pour m’exprimer pleinement.

E : tout est OK de ce côté-là.

A noter : j’attends les feedbacks du coach, et s’il ne m’en fait pas, cela voudra sûrement dire que je mon niveau d’agressivité n’est pas encore suffisant. Je me laisse 2 séances, et s’il ne me fait pas de retour, je réagirai en conséquence.

Conclure sur ces objectifs personnels

Les objectifs de séances sont importants, et ils ne doivent pas forcément venir de l’entraîneur, bien au contraire ! Que vous coopériez avec lui ou pas, que vous osiez ou pas, soyez acteur de votre séance !

Finalement, beaucoup de sportifs viennent à l’entraînement en le subissant, parfois sans s’interroger sur ce qu’ils font. Quelques entraîneurs aussi donnent des exercices sans en expliquer les objectifs. Certains sportifs peuvent donc être sur la réserve, soit parce qu’ils ne comprennent pas, soit parce qu’ils ne savent pas à quoi ça sert.

N’oubliez pas que la relation entraîneur / entraîné n’est pas une relation boss méprisant / employé méprisé ! Toute relation est à construire, et même quand on est timide, les objectifs sont un bon moyen de briser la glace.

Le préparateur mental est là pour accompagner les sportifs vers leurs objectifs. Ils sont formés pour vous faire réfléchir, vous aider à verbaliser l’action. Ils sont des appuis pour ceux qui se sentent perdus, isolés. Ainsi, pour faire le lien avec la thématique de la baisse de motivation, apprendre à fixer des objectifs de séance est très important ! En plus, ça peut être fait de manière très ludique. Rendre acteur le sportif qui ne l’est plus : un beau challenge, n’est-ce pas ?